Claudine Decaux

La sexualité lors de la grossesse

Dans le meilleur des cas, une grossesse est désirée, attendue et à son annonce, nous sommes emplis de joie, d’attentes et de projets. Le couple devient de futurs parents, sont très tournés vers ce ventre qui s’arrondit, les échographies, les tests, la préparation de la venue de ce petit prodige. Car oui, nous attendons toujours un prodige !

Lorsque le couple fonctionnait bien au niveau de la communication, de la sexualité et de l’intimité avant la grossesse, il n’y a pas de raison que cette période soit difficile dans le couple.

sexualité lors de la grossesse

Des différences sont souvent observées entre les ressentis des hommes et des femmes lors de cette période.

Les femmes internalisent cette grossesse, la vivent de l’intérieur, sont la source directe de cette vie. Les hormones de la grossesse jouent directement sur leur humeur, leur fatigue, leur libido et leur excitation sexuelle. Futures mamans, vous êtes une usine à bébé ! Votre corps change et c’est un bouleversement que vous n’avez jamais connu auparavant.

Le futur papa, lui, vit cette grossesse souvent plutôt de l’extérieur, plus impliqué dans le pragmatisme, la préparation de l’arrivée du bébé ( lieu de vie, voiture, préparation de la chambre, finances, etc).

Lorsque les futurs parents utilisent des techniques d’haptonomie, sont complices lors des séances de préparation à la naissance, on peut remarquer que les futurs pères se sentent plus proches et impliqués dans la grossesse.

Au premier trimestre, tout ne semble pas encore très réel. Peu de choses se voient dans les changements physiques, par contre la fatigue, les nausées (pas toujours) et d’autres symptômes typiques de la grossesse influent à la fois psychiquement et physiquement la femme enceinte.

 

Les possibles troubles physiques et psychiques de ce début de grossesse peuvent affecter la femme, par rapport à elle-même en tant que future mère mais aussi par rapport à sa sexualité. Au niveau psychique, certaines femmes ne se « sentent » plus femmes mais mères, ont eu une motivation antérieure importante dans les rapports sexuels afin d’être enceintes, et par conséquent ne voient plus vraiment « l’intérêt » de la sexualité. D’autres peuvent avoir une difficulté à accepter leur corps qui change, ce qui peut faire ressurgir des complexes ou une insécurité dans leur désirabilité. Dans tous les cas, il s’agit d’une période adaptative à la « vie d’avant »,où la femme se pose souvent mille questions quant à sa capacité à être « une bonne mère », à l’établissement des changements au niveau de leur travail, de leur carrière. Physiquement, les femmes peuvent avoir des douleurs lors des rapports, une sensibilité génitale accrue et des douleurs aux seins invalidantes pour les contacts physiques. La douceur, l’écoute de soi et de l’autre sont donc de mise.

Quant aux pères, cette période peut également être anxiogène et leur adaptation aux changements est fondamentale. Eux aussi prennent conscience de leur  future responsabilité parentale, souvent ont des craintes quant à subvenir à leur progéniture. De plus, certains hommes peuvent avoir peur de provoquer une fausse couche en ayant un rapport, ce qui peut les rendre distants sexuellement.

Le second trimestre en général représente la meilleure période pour la sexualité. Passée la peur d’une éventuelle fausse couche, la femme se sent vraiment « enceinte », son ventre s’arrondit, les projections sur l’enfant commencent à se faire, parfois nous pensons déjà au prénom de ce bébé à naitre. Les nausées ont disparu, parfois même elles ressentent un regain de vitalité.

Certaines femmes ont un désir accru de sexualité, se sentant aussi plus sensuelles, épanouies, et les sensations génitales peuvent être décuplées, rendant les femmes plus réceptives à l’orgasme et au plaisir. Le couple également, vivant ce projet ensemble, est plus complice et donc plus dans une intimité favorisant les rapports sexuels. D’autres ne ressentent plus aucun intérêt pour la sexualité. Dans ce cas, il faut en parler et comprendre ce qui se passe.

Les pères peuvent avoir des craintes d’avoir des rapports sexuels avec pénétration. Certains hommes sont anxieux à l’idée de « toucher » le bébé pendant le rapport sexuel. D’autres se sentent mal à l’aise avec les changements corporels de leur conjointe, la voyant comme « mère » plutôt que femme, donc intouchable. Ceux-ci ont alors du mal à désirer leur compagne ou peuvent avoir des troubles érectiles.

Le dernier trimestre devient plus pénible physiquement. La fatigue revient, la lourdeur physique nous atteint, d’autres maux de la grossesse apparaissent (hémorroïdes, troubles de l’estomac, douleurs pelviennes, essoufflement, etc), les femmes ont alors plutôt hâte de l’arrivée du bébé. Il s’agit aussi d’une période où tout s’accélère pour la venue de l’enfant, tout doit être prêt, le couple s’active à préparer le petit nid douillet. Certaines femmes sont très anxieuses à l’idée d’accoucher ou de se sentir débordée après la naissance de leur enfant.

La sexualité peut devenir plus aléatoire voire inexistante. Bien évidemment, si la femme se sent bien et épanouie, tout va bien et la sexualité peut continuer jusqu’au jour de l’accouchement (sauf en cas de béance du col de l’utérus ou encore de problème de prématurité).

Les hommes doivent beaucoup d’adapter dans cette période. Parfois ils ne reconnaissent plus leur compagne, que ce soit au niveau psychique, physique ou sexuel.  Certains hommes peuvent ne plus avoir envie de faire l’amour, soit parce qu’ils ont « peur de faire mal au bébé », d’être responsable d’un accouchement prématuré, soit parce qu’ils  n’arrivent pas à érotiser leur compagne enceinte. Tout rentrera dans l’ordre après quelques mois suivant la naissance de leur enfant en général.

La grossesse est donc une étape dans la sexualité d’un couple. Cette étape doit s’accompagner de communication, d’échanges, de préparation à la naissance. La sexualité est un sujet à discuter dans le couple, pour que chacun-e soit à l’aise et s’adapte au niveau de la fréquence des rapports, des positions sexuelles, des caresses. Rien n’est obligatoire, tout peut se faire, si le couple est en accord.

*Ce texte est écrit à l’attention d’un couple hétérosexuel